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@Christine Hoarau-Beauval – dossier publié dans In Interiors, magazine de Business Immo, le 6 octobre 2020. Dossier complet disponible en cliquant ICI.
L’impact des matériaux sur notre environnement en termes de ressources, de provenance et de cycle de vie est une question de société majeure qui dépasse le simple cadre des acteurs de la construction.
Depuis quelques années, des filières se développent ou reprennent de l’importance, celles des matériaux biosourcés (pierre, terre crue, paille, chanvre…), du réemploi et du recyclage. De manière plus générale, d’autres matérialités, prenant leurs distances avec celles du siècle passé, émergent et conquièrent l’architecture contemporaine, enrichissant le processus de conception.
Béton, acier, bois, terre : de quoi sera faite la ville de demain ?
Construire plus, plus vite, plus écologique, plus modulable, et avec toujours moins de nuisances pour les riverains : à la croisée des urgences urbaines, les principales filières avancent argument contre argument, lobby contre lobby, dans un débat public en pleine recomposition. La question se pose, d’abord, pour des raisons environnementales. À l’attention portée à la consommation énergétique des bâtiments s’ajoute désormais celle portée à la part du carbone imputable à la construction en elle-même – c’est-à-dire, majoritairement, aux matériaux.
Rappelons que le secteur du bâtiment représente 44 % de l’énergie consommée en France, soit 1,1 t équivalente de pétrole par an et par habitant1. Et selon l’Ademe, les émissions de gaz à effet de serre (GES) continuent de croître dans le bâtiment et dans les transports. Soit respectivement +21 % et +17 % en 20 ans. Et dans le monde, trois quarts des infrastructures urbaines qui existeront en 2050 n’ont pas encore été construites. Les architectes estiment qu’au monde construit actuel, va s’ajouter la taille de la ville de New York City toutes les cinq semaines durant les 30 prochaines années2. Face à ces constats, les matériaux biosourcés suscitent d’importants espoirs.
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Alternatives durables et économie circulaire
Loin des débats de lobbys, côté constructeurs et architectes, c’est donc moins les substitutions que les complémentarités que l’on regarde. L’économie circulaire et le mixe de matériaux (béton, bois, terre), en fonction du contexte et des filières, sont des alternatives durables, raisonnables et économes. Elles constituent sans doute, à ce jour, la meilleure réponse pour allier performances économiques et environnementales. Comme le disait l’architecte belge Luc Schuiten : » Construire c’est avant tout détruire, sur une portion de nature, toute trace de vie, pour y déposer dans un ordre géométrique précis des matériaux morts. Le rôle primordial de l’architecte est donc de combiner savamment les différentes matières qu’il aura choisi de juxtaposer3 «
L’agence d’architectes Joly & Loiret, au sein de l’équipe Cycle Terre4 a su proposer un réel changement de paradigme. Plus que le matériau, c’est toute la filière qui a été consolidée autour de la récupération des déblais des chantiers du Grand Paris. Ce qui est aujourd’hui considéré comme un rebut inutilisable et encombrant va devenir une ressource considérable, qui sera traitée dans la fabrique de briques de Sevran en construction. Dans les années à venir, il est envisageable de construire des millions de mètres carrés en réemployant ces terres de chantier plutôt que de les stocker.
En France, le BTP génère 260 millions de tonnes de déchets par an – soit trois quarts des déchets nationaux – dont 30 millions sont des déchets inertes5. Pourtant n’étant pas dangereux, ils sont tout à fait appropriés au réemploi. Les connaissances scientifiques et techniques permettent d’envisager leur réemploi, si nous sommes en retard c’est aussi culturel : un vide juridique freine le changement d’échelle.
L’épuisement des ressources et l’accumulation des déchets nous poussent à questionner en amont et en aval la chaîne de production des bâtiments en envisageant toutes les ressources avec discernement.
3. www.vegetalcity.net. » Mais l’enjeu des matériaux et de la « soutenabilité matérielle » n’est qu’une petite partie des enjeux de la construction durable.
4. L’équipe rassemble des acteurs politiques, économiques, des laboratoires de recherche et des acteurs du monde de la construction (GPA, Sevran, Quartus, SGP, Joly et Loiret architectes, Sciences Po).