Pour le Paris métropolitain, on construit des tours.

La tour est une architecture toujours discutée. Elle a ses admirateurs et ses détracteurs… Reste qu’elle est une architecture à part, qui peut être parfois magnifique. Ce qu’elle donne à ses usagers est unique et en cela que la tour fascine, c’est une expérience. Mais c’est également un défi technique. Concevoir et construire une tour nécessite un savoir-faire spécifique et une part d’expérimentation. 

Chapelle Internationale, Paris 18e, 2020. © Stefan Tuchila.

C’est cette typologie que les architectes de l’agence Brénac et Gonzales ont décidé d’assumer pour le nouveau quartier à l’œuvre à Chapelle Internationale, dans le Nord-est parisien. En 2008, le projet initial prévoyait des bureaux au-dessus d’une halle de fret, il s’agissait plutôt d’un urbanisme horizontal assumé ponctué de logements de type villa-parisienne. « Nous trouvions que cette typologie de villas n’avait pas grand-chose à faire dans ce quartier alors nous avons imaginé  ces « socles de ville » pour faire vivre les rez-de-chaussée entre 0 et 7 mètres. Le quartier est enclavé : le train, la sortie d’autoroute, le périphérique… On a plus une adresse métropolitaine qu’une adresse urbaine. Elle est branchée sur la grande échelle. » dit l’architecte.

SOHO, Brénac et Gonzales architectes, Paris 18e, 2020. © Stefan Tuchila.

La grande échelle : c’est ce dont il s’agit dans ce bout de territoire antagonique, pris entre ses frontières infrastructurelles, et les deux gares du Nord et de l’Est. Mais ce parti-pris reste questionnable tout de même. Pourquoi deux typologies et deux échelles ne pourraient-elles pas cohabiter ? Se compléter dans l’espace ?

On pressent ici l’obsolescence de ces quartiers conçus il y a seulement une dizaine d’années. Cela revient à se poser des questions pragmatiques au regard de l’avenir du paysage de nos grandes métropoles européennes : Tours de bureau, tours de logement, programmes mixtes ? Comment s’inscrivent-elles dans nos villes ? Quelles qualités et spécificités urbaines, spatiales, techniques ? Quels sont leurs critères de soutenabilité dans l’écosystème urbain ?

Peut-on raisonnablement considérer que le quartier ( 7 hectares ) est l’échelle de référence pour la tour ? Ne doit-elle pas aussi s’inscrire dans le paysage de la biorégion, tout comme à l’échelle de l’usage, de la cellule. Ce sont d’ailleurs les propos tenus par l’équipe de l’AUC lors du débat sur le Grand Paris à la Cité de l’architecture en 2009. «  La question environnementale s’envisage à l’échelle de la métropole. »[1] Les bâtiments doivent cesser d’être conçus comme des isolats, pour redevenir des connecteurs. Une grande promenade plantée conçue par Jean-Michel Rameau cherche ces connections et prolonge le projet. « On espère pouvoir faire le lien Gare du Nord – Seine-Saint-Denis. » déclare l’architecte[2].

SOHO, Brénac et Gonzales architectes, Paris 18e, 2020. © Stefan Tuchila.

Dans une capitale à l’étroit, c’est ici encore une fois la densité ( égale à 6 ) qui s’exprime. Pour compenser, les architectes imaginent pour leurs 254 logements des balcons, des « rues intérieures aux usages partagés », des pivotements et des variations. Mais à l’échelle domestique, la disponibilité d’espaces partagés « habitables » a été beaucoup remise en cause par la crise actuelle du Covid-19, difficile de s’en affranchir à l’analyse de ce projet à l’œuvre… 

Ce sont donc 2 tours de 25 mètres, montées sur des socles, qui cherchent à « éviter l’effet tour », qui se dressent désormais dans ce nouveau quartier métropolitain.


[1] Source : https://www.youtube.com/watch?v=xPjrWdX8vM0&feature=emb_rel_pause

[2] Visite de presse du 24 juin 2020. Agence Brénac et Gonzales.

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